L’Apôtre Pierre a t-il été le premier Pape?

Il n’existe pas de preuve historique directe que l’apôtre Pierre ait été « pape » au sens où l’entend aujourd’hui l’Église catholique. Dans le Nouveau Testament, Pierre est un ancien parmi d’autres (voir 1 Pierre 5:1 où il se décrit comme « ancien comme eux » — pas comme roi ou chef suprême). Il est l’un des apôtres principaux, très actif dans les Évangiles et les Actes des Apôtres mais il n’est jamais appelé « pape », ni « évêque de Rome », ni « chef suprême » des autres apôtres. Aucun texte biblique ne dit qu’il était basé à Rome en tant qu’évêque.

Le développement historique du Pape

Du côté des premiers chrétiens, il n’y a aucun signe non plus que Pierre ait été pape. Clément de Rome (~ an 96), disciple des apôtres, évoque Pierre et Paul comme des martyrs mais pas comme des papes. Irénée de Lyon (~ an 180) dit que Pierre et Paul ont « fondé » l’Église de Rome et qu’ils y ont laissé un successeur (Lin), mais sans présenter Pierre comme évêque unique. Ignace d’Antioche (~ an 110) parle beaucoup des évêques… mais jamais d’un pape. En somme les premiers chrétiens parlaient de Pierre comme d’un apôtre important, mais pas comme d’un pape.

Ce n’est qu’au IIIᵉ – IVᵉ siècles que l’idée d’une primauté de Rome commence à être formalisée. Léon Ier (vers 440–461) est l’un des premiers papes à vraiment revendiquer l’autorité pétrinienne (c’est-à-dire fondée sur Pierre) pour asseoir l’autorité romaine sur l’Église entière. Le concept du « pape comme chef suprême » est une construction historique progressive, pas une réalité directe provenant des apôtres.

Il est très probable que Pierre ait été à Rome et y soit mort martyr. Il est possible que Lin (successeur de Pierre et Paul) ait exercé une fonction de direction parmi les chrétiens de Rome. Mais il n’y a aucune preuve que Pierre ait organisé une succession formelle comme celle d’une monarchie spirituelle. En fait l’organisation monarchique (un seul évêque sur toute Rome) ne s’est consolidée que bien plus tard (vers la fin du IIᵉ siècle). Au début, l’Église de Rome était dirigée de manière collégiale (plusieurs anciens / presbytres, non un seul homme).

Question	Réponse claire
Pierre a-t-il été apôtre ?	Oui.
Pierre a-t-il été à Rome ?	Probablement (tradition forte) — il y a été martyrisé selon la tradition.
Pierre a-t-il été « pape » ?	Non, aucun document biblique ou historique du Ier siècle ne le dit.
Le concept de papauté est-il biblique ?	Non, il se développe beaucoup plus tard.

Les Papes et les Cardinaux à la Lumière du Texte Biblique

Chronologie de l’usage du mot « pape »

La chronologie du mot « Pape » peut également nous éclairer:

Époque	Usage du mot « pape »
3ᵉ siècle (~200–300) (La lettre de Clément d’Alexandrie utilise « papa » pour un évêque.)	« Papa » est utilisé pour appeler affectueusement plusieurs évêques, notamment ceux d’Alexandrie, d’Antioche et de Rome. Ce n’est pas encore un titre exclusif.
Début 4ᵉ siècle (vers 304)	Le mot est employé dans des écrits pour désigner des évêques importants.
Vers 500	Le titre « pape » commence à devenir réservé spécifiquement à l’évêque de Rome.
6ᵉ siècle (vers 590–604)	Avec le pape Grégoire Ier (Grégoire le Grand), l’usage devient presque exclusivement romain, mais sans toute la puissance monarchique que l’on verra plus tard.
11ᵉ siècle (1073)	Sous Grégoire VII, l’Église romaine déclare officiellement que seul l’évêque de Rome a droit au titre de « pape » (Dictatus Papae de 1075).

Nous voyons bien que nous sommes loin d’une notion biblique ou apostolique.

Lin (ou Linus) reçoit le service de l’épiscopat de Pierre et Paul et non la papauté

Irénée de Lyon parle de Lin (le 2nd pape selon l’Église Catholique) dans son ouvrage « Contre les hérésies » (Adversus Haereses), écrit vers 180 après Jésus-Christ :

« Mais puisque ce serait trop long, dans un volume comme celui-ci, d’énumérer les successions de toutes les Églises, nous indiquerons la tradition, la foi proclamée aux hommes par les apôtres, par l’Église la plus grande, la plus ancienne, et connue de tous, l’Église fondée et établie à Rome par les deux très glorieux apôtres Pierre et Paul.
Cette Église, en effet, a reçu de manière particulière, en plus de toute autre, la tradition venant des apôtres, et la foi, qu’elle annonce aux hommes, et qui nous est parvenue. Ainsi, il est nécessaire que toute Église — c’est-à-dire les fidèles de partout — s’accorde avec cette Église, en raison de sa prééminente autorité, puisque dans elle a été conservée la tradition apostolique.

Les bienheureux apôtres, après avoir fondé et organisé l’Église, confièrent le service de l’épiscopat à Linus. C’est de ce Lin que Paul parle dans ses lettres aux Romains. Linus eut pour successeur Anaclet, et après lui, Clément fut nommé évêque. »

Texte d’Irénée (Livre III, chapitre 3)

Le mot employé par Irénée est « le service de l’épiscopat » (episkopès diakonian en grec), ce qui signifie le service d’évêque, pas de « pape » suprême. Irénée insiste sur la prééminence de Rome, non pas pour un pouvoir monarchique, mais parce qu’elle avait bien conservé la foi apostolique à cette époque. Il faut lire cela dans le contexte des hérésies nombreuses à l’époque.