Le Passage de Flavius Josèphe sur Jésus est-il authentique?

Parmi les séculiers et les minimalistes, il est assez courant d’entendre la critique selon laquelle le Testimonium Flavianum (le passage célèbre de Flavius Josèphe sur Jésus) est trop pro-chrétien pour avoir été rédigé tel quel par l’historien juif Flavius Josèphe. Ce témoignage, s’il était établi, serait le rapport écrit non chrétien le plus ancien sur Jésus.

Trois vues existent concernant l’origine de ce passage: l’interpolation complète, l’interpolation partielle, et l’authenticité complète. J’ai pendant longtemps cru en « l’interpolation partielle », c’est à dire en l’idée que certains chrétiens non identifiés auraient exagéré un rapport original de Josèphe au sujet de Jésus. C’est une position qu’on retrouve assez souvent car c’est en général à travers cette vision qu’on découvre cette preuve non biblique sur Jésus. On a donc tendance à l’épouser compte tenu de la nature persuasive des arguments critiques, et surtout compte tenu de notre ignorance sur le contexte et la nature du texte en question.

Dans cet article je vais relater la position de « l’authenticité complète », du Dr Thomas Schmidt dont nous allons relater l’étude majeure (en réalité un livre disponible gratuitement sur josephusandjesus.com).

Voici une version trouvée sur la page Wikipédia de ce « testimonium »:

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« En ce temps-là paraît Jésus, un homme sage, [si toutefois il faut l’appeler un homme, car] ; c’était un faiseur de prodiges, un maître des gens qui recevaient avec joie la vérité. Il entraîna beaucoup de Judéens et aussi beaucoup de Grecs ; [Celui-là était le Christ.] Et quand Pilate, sur la dénonciation des premiers parmi nous le condamna à la croix, ceux qui l’avaient aimé précédemment ne cessèrent pas. [Car il leur apparut le troisième jour, vivant à nouveau ; les prophètes divins avaient dit ces choses et dix mille autres merveilles à son sujet.] Jusqu’à maintenant encore, le groupe des chrétiens [ainsi nommé après lui] n’a pas disparu. »

La page Wikipédia précise « Le texte aurait cependant pu être retouché par des copistes chrétiens, notamment pour les passages signalés entre crochets« . C’est la vue critique classique, le texte serait trop positif pour pouvoir être authentique. Mais nous allons voir qu’en étudiant le style joséphien et en retrouvant le sens des mots à l’origine, la lecture du texte devient beaucoup plus nuancée.

Traduction proposée par Thomas Schmidt

Voici la version du Dr Schmidt (que j’ai traduite depuis l’anglais que l’on retrouve dans son livre accessible gratuitement en ligne):

« Et en ce temps-là, il y eut un certain Jésus, un homme sage, si tant est que l’on doive l’appeler un homme, car il accomplissait des actes stupéfiants, un enseignant d’hommes qui accueillent volontiers des banalités. Il rallia beaucoup de gens parmi les Juifs, et un grand nombre parmi les Grecs. On le tenait pour le Christ.

Et lorsque Pilate, à l’accusation portée par les premiers parmi nous, l’eut condamné à la croix, ceux qui lui étaient d’abord attachés ne cessèrent pas de l’être ; car, le troisième jour, il leur sembla qu’il leur était apparu de nouveau vivant, comme l’avaient annoncé les prophètes divins, hommes qui avaient dit ces choses et mille autres merveilles à son sujet.

Et jusqu’à présent, la tribu des Chrétiens, qui porte son nom, n’a pas disparu.« 

Antiquités des juifs, livre 18, chapitre 3, dans une section dédiée aux troubles durant le mandat de gouverneur de Ponce Pilate

« Un certain Jésus »

Schmidt montre que Josèphe utilise très souvent cette formule pour des personnages secondaires ou pour des figures que le lecteur n’est pas censé connaître, et que cela correspond exactement à ce qu’il ferait pour présenter Jésus dans un contexte historique plus large.

Un interpolateur chrétien ne présenterait probablement pas Jésus comme « un certain », car ce serait une manière trop neutre, voire désinvolte de parler d’une figure centrale du christianisme, il ne situerait jamais Jésus comme une courte notice parmi d’autres personnages mineurs et aurait donné une introduction bien plus solennelle, explicite, ou clairement apologétique.

Schmidt souligne que dans Antiquités 18, Josèphe égrène une liste d’incidents sous Pilate, mentionne des personnages connus (Pilate, Hérode, des leaders samaritains), puis glisse brièvement Jésus comme un personnage historique parmi d’autres figures de cette époque. Le testimonium est cohérent dans son contexte.

« Il accomplissait des actes stupéfiants (ou paranormaux) »

Selon Schmidt, lorsque Josèphe écrit que Jésus « accomplissait des paradoxa », il ne parle pas de « miracles » au sens positif chrétien, mais d’actes stupéfiants, extraordinaires, voire inquiétants.

Dans le grec antique, plusieurs termes peuvent désigner des phénomènes surnaturels:

  • τέρατα (térata), souvent neutre voire positif, utilisé pour des prodiges divins ;
  • σημεῖα (sēmeîă), marqué religieusement, utilisé dans le Nouveau Testament pour les « signes » de Jésus ;
  • δυνάμεις (dýnami), associé à la puissance divine ;
  • θαύματα (thávmata), qui peut être admiratif.

Toutefois Josèphe n’utilise aucun de ces mots dans le Testimonium. Il emploie παράδοξα, littéralement

  • « des choses contraires à l’attente »,
  • « des phénomènes étranges »,
  • « des actes surprenants ou déconcertants ».

C’est un mot ambigu, et souvent non laudatif. Il ne contient pas d’éloge.

Schmidt souligne que dans d’autres passages, Josèphe utilise ce même mot pour parler des magiciens du Pharaon (Antiquités 2.285) et de personnages qui accomplissent des actes surnaturels mais suspects, associés à la magie ou à des pouvoirs « pernicieux ». Dans ces contextes, paradoxa n’a pas un sens positif. Ce mot signale quelque chose d’étrange, potentiellement trompeur, voire dangereux.

Pour Schmidt, le choix de ce mot est déterminant:

  • Le mot est polyvalent: il peut être neutre (« choses étonnantes »), mais aussi négatif en désignant des phénomènes suspects ou des prodiges inquiétants.

Ainsi, le passage entier peut être relu à la lumière de ce choix lexical. Par exemple :

  • « un homme sage » pourrait être ironique,
  • « si toutefois il faut l’appeler un homme », peut être une allusion à des pouvoirs non humains mais suspects,
  • « enseignant des hommes qui accueillent volontiers des banalités » ce qui peut se lire comme une pique contre des disciples crédules.

Autrement dit le terme paradoxa colore tout le début du Testimonium d’une nuance négative ou sceptique. Josèphe, ailleurs, emploie paradoxa pour des actes de magiciens et non pour des signes divins légitimes.

Si un scribe chrétien avait inventé le passage, il aurait probablement utilisé:

  • « signes »,
  • « miracles »,
  • « œuvres de puissance »,
  • ou d’autres termes valorisants typiques du vocabulaire chrétien.

Il n’aurait pas choisi un mot utilisé par Josèphe pour des magiciens, chargé de connotations ambiguës, voire péjoratives et susceptible d’insinuer la tromperie ou la magie douteuse. Le mot paradoxa est donc typiquement joséphien et étranger au style chrétien.

« Si tant est que l’on doive l’appeler un homme »

Schmidt explique que dans le grec de Josèphe, cette tournure ne suggère pas forcément qu’un personnage est « plus qu’humain ». Elle peut tout autant, voire plus naturellement, signifier:

  • « si l’on peut encore l’appeler un homme« ,
  • un sous-entendu: « un être douteux, qui ne se comporte pas comme un véritable homme« ,
  • et parfois même: « quelqu’un d’infâme, dégradé, ou inquiétant« .

Autrement dit, le ton peut être méprisant: plutôt « moins qu’un homme” »que « plus qu’un homme ».

C’est un usage connu, Josèphe utilise ce genre d’expression pour parler de personnes moralement corrompues, ou impliquées dans des actes qu’il juge répréhensibles.

Les chrétiens du Ier–IIIe siècle insistaient fortement sur l’humanité réelle de Jésus. Ils combattaient déjà des doctrines qui affirmaient que Jésus n’était pas vraiment humain (le docétisme). Pour eux, Jésus était vraiment homme et vraiment Dieu: nier son humanité revenait à nier l’Incarnation. Aucun chrétien orthodoxe n’aurait inséré dans un texte une phrase qui semble douter que Jésus ait été un homme. Cela aurait été considérée comme dangereusement proche de l’hérésie.

Schmidt note aussi que si un interpolateur chrétien avait été docète, il aurait plutôt écrit explicitement que Jésus n’était pas un homme et pas une tournure ambiguë comme « si tant est que l’on doive l’appeler un homme ».

Les docètes prétendaient que Jésus n’avait pas réellement de corps, que sa souffrance n’était qu’apparence et qu’il n’avait jamais été vraiment un homme.

La phrase dans Josèphe ne reflète ni la théologie orthodoxe, ni les doctrines hérétiques connues. Elle ressemble donc beaucoup plus à un commentaire acerbe d’un auteur juif non chrétien, qui observe un personnage associé à des phénomènes étranges (paradoxa), et insinue que cet homme est « bizarre », « anormal », peut-être « dangereux ».

La tournure « si tant est que l’on doive l’appeler un homme » est difficilement concevable sous la plume d’un interpolateur chrétien orthodoxe et pas vraiment adaptée à un hétérodoxe docète, mais parfaitement cohérente avec le style de Josèphe, lorsqu’il parle de personnages suspects ou douteux.

Donc, pour Schmidt, cette phrase est un indice fort d’authenticité: elle reflète la perspective d’un auteur juif sceptique face à un thaumaturge dont les « actes stupéfiants » pouvaient être perçus comme de la magie.

« On le tenait pour le Christ »

Le grec « il était le Christ » (ἦν) pose un problème chrétien évident. Dans les manuscrits grecs actuels, le texte dit: « il était le Christ » (au passé). Pour Schmidt, ceci est très étrange si un chrétien avait interpolé le passage:

  • Un chrétien dirait plutôt « il est le Christ »,
  • ou « il est le Messie »,
  • jamais « il était le Christ », qui suggère quelque chose de révolu, un homme mort, du passé.

Le passé affaiblit, voire annule l’affirmation chrétienne.

Cela suggère que la formulation n’a pas été pensée comme une confession chrétienne, mais comme un constat historique extérieur, ce qui correspond mieux à Josèphe.

Les versions syriaques et latines anciennes soutiennent une autre lecture: « on le pensait / on le croyait être le Christ« . Schmidt rappelle deux témoins textuels importants:

  • Jacques d’Édesse :
    « Il était tenu pour être le Christ »
    « he was thought to be the Christ»
  • Jérôme :
    → «credebatur esse Christus»
    → «il était cru être le Christ»

Ces deux témoins non grecs montrent une tradition où la phrase ne signifie pas: « il était (certainement) le Christ » mais:

  • « on le tenait pour le Christ »,
  • « certains croyaient qu’il était le Christ ».

Cela supprime le caractère dogmatique: ce n’est plus une affirmation, mais un rapport d’opinion. Cela correspond exactement à la manière dont Josèphe parle de Jésus ailleurs (Ant. 20): « Jésus, celui qu’on appelait Christ ».

Schmidt propose que le grec original disait peut-être:

  • λέγετο / ἐνομίζετο / ἐπιστεύετο χριστὸς εἶναι
  • « il était tenu / considéré / cru être le Christ »

Il suffit qu’un mot ait disparu dans la transmission (haplographe, omission par saut d’œil, lissage scribal) pour que le texte devienne:

  • « il était le Christ ».

Ce genre de perte est fréquent dans la tradition manuscrite. Schmidt estime donc que le grec actuel est probablement un témoignage tronqué et que les versions syriaque et latine conservent la trace d’une formulation josephienne plus neutre.

Une interpolation chrétienne aurait produit l’inverse. C’est l’un des points centraux de Schmidt. Si des chrétiens avaient voulu forger le passage, ils n’auraient pas choisi une formulation ambiguë, au passé, ni un style rapporté (« on le croyait… »), mais quelque chose de fortement apologétique comme:

  • « Il est le Christ »,
  • « Il est vraiment le Messie »,
  • ou « C’est le Christ annoncé par les prophètes ».

Or, le texte actuel dit juste:

  • « il était le Christ »,
  • ou dans les versions anciennes : « on le tenait pour être le Christ ».

Cela ne ressemble ni au style chrétien, ni à un ajout dogmatique, mais à une notice d’historien rapportant une opinion populaire.

L’expression telle qu’on la lit dans le grec est trop faible, trop ambiguë et trop maladroite pour venir d’un chrétien.

Les versions anciennes montrent une lecture plus neutre, typique de Josèphe: « on le croyait être le Christ ». Il est très probable qu’un mot a été perdu dans la tradition grecque. Ce passage reflète donc un constat sociologique, pas une confession de foi chrétienne.

« Il leur sembla qu’il leur était apparu de nouveau vivant »

Le verbe utilisé par Josèphe exprime une perception subjective et non la réalité objective. Dans le Testimonium, Josèphe écrit que les disciples ont pensé que Jésus leur était apparu vivant. Ce n’est pas une affirmation factuelle (« Jésus est réellement ressuscité »), mais une expression de perception :

  • « Il leur sembla qu’il était réapparu vivant »
  • « Ils eurent l’impression qu’il était revenu à la vie »

C’est une tournure grecque que Josèphe utilise ailleurs dans un sens très clair: décrire ce qui paraît vrai aux protagonistes, même si ce n’est pas réellement le cas.

Josèphe utilise exactement la même formule dans l’histoire de Joseph (le fils de Jacob dans le livre de la Genèse cette fois-ci). Dans Antiquités 2.37–39, Josèphe raconte comment:

  • les frères de Joseph vendent Joseph en esclavage,
  • puis trempent son manteau dans le sang,
  • et le montrent à Jacob en disant qu’il a été tué par un animal sauvage.

Et Josèphe écrit que cette mise en scène a été faite « afin qu’il lui parût avoir été tué par des bêtes ». Or, Joseph n’est pas mort, mais cela paraît ainsi à Jacob parce qu’il interprète mal les faits. Le verbe exprime clairement une apparence trompeuse ou une interprétation subjective. Donc, dans le Testimonium, le verbe n’implique pas que Josèphe croit à la résurrection.

En appliquant le même usage au Testimonium:

« Il leur sembla qu’il était de nouveau apparu vivant » indique que les disciples croyaient avoir vu Jésus vivant, mais cela ne signifie pas que Josèphe valide cette croyance. Le parallèle avec l’histoire de Joseph montre que:

  • le verbe décrit ce que les personnages pensent,
  • sans pour autant donner tort ou raison,
  • et surtout sans accréditer la réalité de l’événement.

Pour Schmidt, c’est exactement ce qu’un historien juif sceptique écrirait: rapporter ce que les disciples croyaient avoir vu, sans affirmer la résurrection.

Un interpolateur chrétien n’aurait probablement pas utilisé un verbe aussi ambigu et affaiblissant. Les chrétiens auraient affirmé :

  • « il apparut vivant » (sans nuance),
  • ou « il ressuscita »,
  • ou « Dieu le fit revivre ».

Ils n’auraient pas écrit une phrase suggérant une simple impression subjective. Dans la littérature chrétienne antique, les verbes traduits par « il leur sembla » sont rarement employés pour décrire la résurrection, car ils risquent de paraître docètes ou douteux.

La lecture des anciens chrétiens

Schmidt souligne que contrairement à ce que supposent certains critiques modernes, les chrétiens de l’Antiquité n’ont jamais utilisé le Testimonium comme une preuve apologétique majeure. Pourquoi? Parce que le passage, tel qu’ils le lisaient, n’était pas suffisamment positif: plusieurs expressions qu’on croit aujourd’hui « chrétiennes » (par ex. paradoxa ou « si tant est qu’on doive l’appeler un homme ») sont ailleurs dans Josèphe à connotation neutre ou négative, et ces lecteurs anciens étaient conscients que le texte n’offrait pas une image triomphante de Jésus.

Ils ne voyaient pas dans ce passage une confirmation éclatante de la foi chrétienne. D’où le fait qu’ils ne l’utilisaient pas dans leurs grandes défenses apologétiques. Dans un appendice, Schmidt traite en détail la thèse selon laquelle Eusèbe de Césarée aurait forgé tout le Testimonium. Il montre notamment:

  • que le style et le vocabulaire du testimonium ne correspondent pas aux habitudes d’Eusèbe lorsqu’il fabrique ou paraphrase des citations,
  • que les expressions ambiguës ou négatives sont incompatibles avec la théologie eusebienne,
  • que si Eusèbe avait voulu créer une preuve apologétique, il aurait écrit quelque chose de beaucoup plus clair et affirmatif.

Ainsi, pour Schmidt, l’hypothèse d’une invention eusebienne ne tient pas: le texte ne ressemble ni dans sa forme ni dans sa théologie au style d’Eusèbe.

Pourquoi Origène n’a-t-il pas utilisé le Testimonium contre Celse?

Schmidt répond à cet argument clé: Origène connaissait Josèphe (il le cite explicitement). Pourtant, il ne cite jamais le Testimonium contre Celse, alors même que Celse attaque Jésus précisément sur un point traité par Josèphe:

  • Celse dit que Jésus accomplissait des paradoxa par magie.
  • Josèphe dit aussi que Jésus accomplissait des paradoxa.

Pour Schmidt, c’est justement la clé: le Testimonium utilisait le même vocabulaire que l’accusation de Celse. Donc si Origène avait cité ce passage, il aurait semblé confirmer l’accusation de Celse (à savoir que Jésus accomplissait des prodiges douteux, proches de la magie, une accusation affirmée à plusieurs reprises dans le Nouveau Testament par les pharisiens). Autrement dit:

Le Testimonium, tel que lu par Origène, ne servait pas l’apologétique chrétienne mais risquait de la fragiliser.

C’est pourquoi Origène l’ignore, non pas parce qu’il ne l’avait pas dans ses manuscrits, mais parce qu’il ne pouvait pas s’en servir contre Celse sans se tirer une balle dans le pied.

Les chrétiens anciens n’ont pas considéré le Testimonium comme un texte apologétique utile, parce qu’ils y voyaient des nuances ambiguës ou négatives.

Le réseau de Flavius Josèphe

Josèphe était extrêmement bien connecté. Schmidt rappelle que Josèphe appartenait à une famille sacerdotale aristocratique, il connaissait les grands prêtres, les rois, les reines, et les chefs du Sanhédrin ; et il se présentait lui-même comme un Pharisien issu de l’élite religieuse. Cela signifie que Josèphe se trouvait au cœur du système religieux et politique qui avait directement interagi avec Jésus. Il connaissait:

  • le grand prêtre Anne,
  • son gendre Caïphe,
  • les prêtres du Temple,
  • le Sanhédrin,
  • et Hérode,

…qui avaient participé à l’arrestation, au jugement et à la condamnation de Jésus.

Dans le Testimonium, Josèphe écrit:

« lorsque Pilate, à l’accusation portée par les premiers parmi nous… »

Schmidt montre que cette expression est techniquement signifiante, car Josèphe l’utilise ailleurs, notamment dans son Autobiographie (Vie 2):

  • Il y raconte que, vers 51–52 apr. J.-C. (soit une vingtaine d’années après la mort de Jésus),
    il était en contact étroit avec « les hommes les plus éminents de Jérusalem ».
  • Il dit les avoir fréquentés pendant plus de dix ans, dès sa jeunesse.

Cela veut dire que Josèphe connaissait personnellement plusieurs des hommes qui avaient participé au procès de Jésus. Et le « parmi nous » inclut Josèphe lui-même dans ce cercle: il parle ici de son propre groupe social, la haute élite sacerdotale. Ainsi le Testimonium sous-entend:

Josèphe connaissait ceux qui avaient accusé Jésus. Non pas de loin, mais par relations personnelles directes.

Le réseau sacerdotal autour d’Anne, Caïphe et leurs fils

Schmidt souligne que :

  • Anne (Anânos / Hanan), grand prêtre émérite,
  • son gendre Caïphe,
  • et Anne II, l’un des fils d’Anne,

…appartenaient tous à la même élite sacerdotale que la famille de Josèphe.

Et ces personnages:

  • étaient présents ou impliqués dans l’arrestation et le jugement de Jésus,
  • occupaient des postes où la présence à Jérusalem à la veille de Pâque était obligatoire,
  • appartenaient au réseau que Josèphe fréquentait, selon ses propres écrits.

Par exemple :

  • Jésus est conduit d’abord chez Anne, ce qui suggère son rôle central ;
  • Caïphe préside le Sanhédrin ;
  • et un de leurs fils, Anne II, deviendra ensuite l’adversaire personnel de Josèphe, signe d’un milieu social très étroit où tout le monde se connaît (il était probablement aux côtés de son père lors du procès de Jésus car c’était la veille de la pâque et la tradition faisait que les fils rejoignaient la maison de leur père à cette période de l’année).

Il est donc hautement probable que Josèphe ait connu individuellement les accusateurs de Jésus.

Le lien Paul – Gamaliel – Simon – Josèphe : même réseau, même génération

Schmidt élargit ensuite:

  • Paul étudiait sous Gamaliel, chef du Sanhédrin dans les années 30–40.
  • Josèphe était lui aussi pharisien, et il connaissait Simon, fils de Gamaliel.
  • Simon étudiait traditionnellement avec son père, donc il connaissait probablement Paul.

Cela indique que Josèphe n’était qu’à un ou deux degrés de séparation des acteurs du procès de Jésus.

Schmidt combine ces éléments :

  • Gamaliel, en tant que chef du Sanhédrin, devait être présent au procès de Jésus, car un procès pour fausse prophétie exigeait la présence de l’ensemble du Sanhédrin.

Donc:

  • Gamaliel était là ;
  • son fils Simon était probablement là aussi (comme on l’exigeait pour la veille de Pâque dans la maison paternelle) ;
  • et Josèphe connaissait Simon personnellement.

Cela place Josèphe dans un réseau direct comprenant au moins un membre du Sanhédrin qui a assisté au procès de Jésus. Josèphe avait des sources directes et fiables sur Jésus. Schmidt conclut:

  • Josèphe connaissait les élites sacerdotales impliquées dans l’arrestation et le procès de Jésus.
  • Il fréquentait les « premiers parmi nous« , expression qui renvoie à ces mêmes acteurs.
  • Il connaissait aussi des figures liées au procès des apôtres.
  • Et il n’aimait pas certains des mêmes hommes qui avaient condamné Jésus, ce qui explique une éventuelle sympathie pharisienne modérée envers Jésus, comme Nicodème.

Le Testimonium prend alors tout son sens:

Josèphe parle de personnes qu’il connaissait personnellement,
et cela explique la précision du détail « les premiers parmi nous ».

Cela renforce la probabilité que le passage est authentique, car un interpolateur chrétien n’aurait jamais pensé à insérer une expression si technique et si liée au réseau réel de Josèphe.

Jacques, frère de Jésus

Josèphe rapporte également dans ses écrits l’exécution de Jacques, frère de Jésus. Dans Antiquités 20, il raconte un événement majeur de l’année 62 apr. J.-C.: le grand prêtre Anne II (Anânos fils d’Anne), qui était le commandant de Josèphe dans sa jeunesse, fait comparaître devant le Sanhédrin Jacques, le frère de Jésus, celui qu’on appelle Christ, et le fait exécuter avec plusieurs autres.

C’est un épisode dramatique et bien attesté, que Josèphe décrit avec précision.

L’exécution a provoqué un scandale considérable. Selon Josèphe:

  • cette initiative était illégale, car le gouverneur romain n’avait pas été consulté ;
  • les notables de Jérusalem étaient indignés ;
  • et lorsqu’ils ont alerté les autorités romaines, les Romains ont destitué Anne II de son poste de grand prêtre.

Ainsi l’exécution de Jacques n’a pas été un incident mineur mais une crise politico-religieuse majeure.

Anne II continuait donc de persécuter les chrétiens après la mort de Jésus. Schmidt souligne que cet épisode montre que la famille sacerdotale responsable du procès de Jésus (Anne, Caïphe, leurs fils) continuait encore à s’opposer activement aux dirigeants chrétiens trente ans plus tard. Anne II était prêt à risquer sa carrière pour agir contre Jacques, signe que Jacques et le mouvement chrétien représentaient une menace réelle pour lui. Cela révèle que les premiers chrétiens étaient perçus comme un danger important par l’élite juive.

Josèphe était au cœur de ces événements. Schmidt insiste:

  • Anne II était le supérieur direct de Josèphe dans les années 50 ;
  • Josèphe connaissait personnellement les chefs du Sanhédrin ;
  • il se situait au centre même des cercles qui ont persécuté Jacques ;
  • il avait donc un accès direct à toutes les tensions religieuses provoquées par les chrétiens.

En clair Josèphe était extrêmement bien placé pour connaître les détails concernant Jacques, les apôtres, et par extension Jésus lui-même.

Si Josèphe était si bien informé au sujet de Jacques, s’il connaissait personnellement Anne II et s’il se situait parmi les élites sacerdotales les plus hostiles au christianisme… alors il est difficile d’imaginer qu’il n’ait rien su du mouvement chrétien primitif, ni rien relevé au sujet de Jésus.

Ainsi le fait que Josèphe parle de Jacques, le frère de Jésus, renforce fortement la plausibilité qu’il ait aussi écrit sur Jésus dans Antiquités 18. Et cela explique pourquoi son témoignage pourrait être bref, informé et rédigé avec la distance critique typique d’un pharisien de l’aristocratie sacerdotale.

Anne II, supérieur de Josèphe, en ayant fait exécuter Jacques, le frère de Jésus, a provoqué un scandale majeur. Cela montre que le mouvement chrétien était perçu comme dangereux et important. Josèphe, situé au cœur de ce réseau, ne pouvait pas ignorer les controverses entourant Jésus, Jacques, et les apôtres.

L’existence même de cet autre passage sur Jacques renforce l’idée que le Testimonium Flavianum est authentique: Josèphe avait l’intérêt, les contacts et les sources pour écrire sur Jésus.

Pour Schmidt, l’ambiguïté de Josèphe envers Jésus ne vient pas seulement de sa position de juif non chrétien, mais aussi de ses mauvaises relations avec certains des hommes impliqués dans la condamnation de Jésus, en particulier Anne II (Anânos fils d’Anne).

  • Anne II est le grand prêtre qui, en 62, fait exécuter Jacques, le frère de Jésus, ce qui provoque un scandale et lui coûte sa charge.
  • C’est aussi un homme que Josèphe connaît personnellement et qui finira par le trahir: leurs relations sont mauvaises, Josèphe le présente de façon très critique.

Schmidt en tire une conséquence psychologique et historique :

  1. Les mêmes familles sacerdotales (Anne, Caïphe, leurs fils, dont Anne II)
    • ont contribué à faire condamner Jésus,
    • puis à persécuter les premiers chrétiens (Jacques, etc.),
    • et ont ensuite trahi Josèphe lui-même.
  2. Josèphe a donc de fortes raisons personnelles de ne pas être aligné sur ces élites.
    Il peut être moins hostile à Jésus qu’elles ne l’étaient, ou du moins moins motivé à le diaboliser.
  3. Cela expliquerait le ton ambigu du Testimonium :
    • ni panégyrique chrétien,
    • ni charge violente contre Jésus,
    • mais une notice un peu froide, parfois ironique, qui rapporte les faits et les croyances des disciples sans adopter ni la haine des prêtres, ni la foi des chrétiens.

En résumé, pour Schmidt:

L’ambiguïté de Josèphe à propos de Jésus s’explique aussi par ses conflits personnels avec certains des responsables de la crucifixion (comme Anne II).
Déçu et trahi par les mêmes familles qui s’étaient dressées contre Jésus, Josèphe n’a aucune raison d’épouser pleinement leur hostilité – ce qui laisse place à un témoignage nuancé, parfois sceptique, mais pas viscéralement anti-chrétien.

Conclusion

Le Dr Schmidt déclare:

« Le passage sur Jésus que Josèphe a écrit est authentique.
Josèphe a réellement dit ces choses.
Et que nous raconte-t-il ? Il nous dit que Jésus accomplissait des miracles.
Il nous dit que les disciples ont cru, le troisième jour, que Jésus était revenu à la vie, en accomplissement de la prophétie juive.

Josèphe connaît des personnes qui ont jugé les apôtres. Il a donc un accès très direct à des informations à la fois sur Jésus et sur les apôtres.
Il connaît des personnes qui ont jugé Jésus. Il connaît des personnes qui ont jugé les apôtres.

Et il affirme que cet événement de la résurrection s’est produit le troisième jour.
Le message que les disciples prêchaient n’est pas quelque chose qui se serait développé après des années, des décennies, ou des générations, comme le prétendent certains spécialistes sceptiques.
C’est quelque chose qui s’est produit au troisième jour, que les apôtres ont annoncé et n’ont cessé d’annoncer.

Et, comme Josèphe nous l’indique, certains apôtres étaient même prêts à mourir pour cette conviction, comme Jacques, le frère de Jésus.

C’est un témoignage puissant sur la vie et le ministère de Jésus, et sur la profonde conviction des apôtres dans la résurrection de Jésus.« 

Josephus and Jesus – New Evidence for the One Called Christ: Digging for Truth Episodes 272/273

Ce rapport historique de Flavius Josèphe revêt une grande importance car si d’un côté la science nous révèle qu’un créateur existe, de par la beauté, l’art et l’ingénierie rencontrés dans la création, c’est l’histoire qui identifie ce créateur, en la personne de Jésus-Christ. S’il n’y avait que les lois naturelles, l’univers n’existerait pas, il a fallu un créateur.

Les deux premières lois de la thermodynamique enseignent la conservation de l’énergie et de la matière et l’augmentation de l’entropie (ou du désordre) dans un système thermodynamique. Il est impossible de créer de la matière et de l’énergie à partir de rien et nous savons que l’univers est parti d’un état ordonné. Jésus en multipliant les pains, en changeant l’eau en vin, en marchant sur l’eau, en guérissant les malades, en ressuscitant Lazare et en ressuscitant lui-même a prouvé qu’il était le créateur, celui qui a créé les lois naturelles, l’énergie et la matière et qu’il les a exploités et agencés pour créer la vie.

La science nous dit donc qu’un Créateur doit exister, capable de mettre en place les lois naturelles et de les supplanter au besoin, l’histoire, notamment à travers Flavius Josèphe, identifie ce Créateur de par ses actes défiant les lois naturelles.

« Il s’éleva un grand tourbillon, et les flots se jetaient dans la barque, au point qu’elle se remplissait déjà.

Et lui, il dormait à la poupe sur le coussin. Ils le réveillèrent, et lui dirent: Maître, ne t’inquiètes-tu pas de ce que nous périssons?

S’étant réveillé, il menaça le vent, et dit à la mer: Silence! tais-toi! Et le vent cessa, et il y eut un grand calme.

Puis il leur dit: Pourquoi avez-vous ainsi peur? Comment n’avez-vous point de foi?

Ils furent saisis d’une grande frayeur, et ils se dirent les uns aux autres: Quel est donc celui-ci, à qui obéissent même le vent et la mer?« 

Marc 4:37-41

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