L’EXODE

LA CONQUETE DE CANAAN

L’archéologie atteste-t-elle la Conquête de Canaan par les Israélites?

La fameuse conquête de Canaan rapportée dans le livre de Josué est-elle historique ? Trouve-t-on des éléments archéologiques convaincants à ce sujet ?

Les enfants d’Israël ont quitté l’Égypte, se sont rendus au mont Sinaï où ils ont reçu la loi de Dieu et ont fait une alliance pour être son peuple. Puis après avoir passé 40 ans dans le désert, Moïse a transféré son autorité à Josué et est monté au mont Nébo où il est mort.

Les Israélites attendaient depuis des siècles que la promesse se réalise et c’était maintenant Josué qui les conduirait dans leur conquête de Canaan. Cette conquête de Canaan par les Israélites a-t-elle eu lieu ? C’est ce que nous allons explorer.

Le pays de Canaan était très différent de l’Égypte. C’était une terre gouvernée par de nombreuses cités-États indépendantes avec des noms comme Hatzor, Jéricho, Hébron et Arad.

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L’histoire de ces villes a été divisée en deux périodes majeures, l’âge du bronze moyen, correspondant au Moyen-Empire de l’Égypte, quand elles étaient florissantes et fortifiées par de hauts murs, et la fin de l’âge du bronze final, correspond au Nouvel-Empire de l’Egypte, lorsqu’une destruction soudaine et des incendies se sont abattus sur ces villes, les laissant en ruine.

Bien des archéologues diraient qu’il n’y a pas de preuve de cette conquête à la fin de l’âge de bronze, mais tout comme pour les preuves de l’Exode, en regardant au bon endroit et au bon moment on trouve beaucoup d’éléments satisfaisants1.

L’historique des recherches à Jéricho

Cela semble logique d’étudier le site clé, Jéricho, la première ville que les Israélites auraient détruite, et dont nous connaissons exactement l’emplacement.

Des fouilles archéologiques majeures à Jéricho ont débuté au début des années 1900 avec une équipe allemande, dirigée par Erns Sellin, suivie par une équipe britannique, dirigée par John Garstang, dans les années 1930, au moment de leurs fouilles, à la fois Selling et Garstang, croyaient avoir découvert une couche de destruction, qui correspondait à l’histoire biblique.

Cependant, les choses ont pris une autre tournure, lorsque Kathleen Kenyon a creusé à Jéricho dans les années 1950. Elle a démontré qu’il n’y avait aucune preuve d’une destruction de Jéricho correspondant au récit biblique parce qu’elle datait la destruction de la ville beaucoup plus tôt.

Une vague de scepticisme a commencé à balayer le domaine de l’archéologie, en un instant, la découverte de Kenyon à Jéricho avait sapé toute l’histoire de l’exode.

Elle s’attendait à ce qu’il y ait des preuves à la fin de l’âge du bronze mais il n’y en avait pas. Si les Israélites étaient arrivés au XIIIe siècle dans la zone, ils n’y auraient trouvé quasiment personne et aucun mur à abattre, entraînant une inadaptation au récit biblique.

Ses fouilles ont donc contribué à cette vision très négative qui se développait, non seulement à Jéricho, mais également sur d’autres sites.

Les éléments archéologiques de Jéricho

S’il n’y avait pas de Jéricho au moment où Josué a conquis la terre promise, le récit de Josué est fictif, la conquête est fictive, et alors probablement l’exode est aussi un récit de fiction.

Mais pourquoi ne pas se poser la question simple: quand Jéricho a t-elle fonctionné et quand a t-elle été détruite ? Nous pourrions alors commencer à travailler de manière ordonnée.

La conquête a commencé avec les Israélites traversant le Jourdain. Josué a envoyé des hommes pour espionner la ville massivement fortifiée de Jéricho et là ils ont rencontré une prostituée nommée Rahab qui a rapporté que tout le pays avait entendu ce que Dieu avait fait pour les Israélites et ils en étaient terrifiés. Rahab cacha les espions et les aida à fuir vers les montagnes.

Quelles preuves voyons-nous donc correspondant à la conquête de Jéricho?

Bryant Wood :

Bryant Wood :

Tout d’abord, on nous dit que Jéricho était fortifié. Lorsque les archéologues ont creusé la ville, en particulier Kathleen Kenyon, ils ont découvert que le tell sur lequel la ville était construite était entouré d’un grand rempart de terre.

Les archéologues ont constaté que Jéricho était protégé par un système défensif brillant. À sa base se trouvait un mur de soutènement en pierre de plus de 4.5 mètres de haut, avec un mur d’extension défensif en briques de boue s’élevant encore plus haut.

Derrière celui-ci se trouvait le rempart, une pente raide recouverte d’une surface lisse de plâtre blanc où les assaillants auraient été exposés à des flèches et des pierres de fronde d’en haut. Au sommet de ce rempart se trouvait l’enceinte principale de la ville également en briques de terre crue, celle-ci mesurant plus de 7.5 mètres de haut et de 3 mètres d’épaisseur.

Imaginez la peur et la panique désespérée des habitants de Jéricho. Jour après jour pendant six jours, le peuple d’Israël marchait autour de la ville avec l’arche de l’alliance et le son des cornes de bélier, puis le septième jour, il encercle la ville sept fois et les prêtres donnent un long souffle sur leurs cornes, les israélites lâchent alors un puissant cri. Les murs s’effondrent, permettant aux Israélites de monter dans la ville, de la prendre et de commencer la conquête de la terre d’Israël.

La séquence de destruction de Jéricho

Bryant Wood :

Lorsque la ville a connu sa fin, ces murs de briques de boue se sont effondrés, et ils sont en fait tombés à la base du mur de soutènement en pierre.

Kenyon le décrit très clairement et en détail dans son rapport de fouille.

Et puis on nous dit qu’ils ont mis le feu à la ville, et c’est exactement ce que nous trouvons: Jéricho a été massivement détruit par le feu.

Kenyon a déclaré qu’il était très clair qu’à l’intérieur de la ville, les murs des bâtiments étaient également tombés et elle a dit que les murs sont tombés avant l’incendie.

Nous avons donc la séquence que nous lisons dans la Bible: d’abord les murs qui tombent, puis la ville qui est incendiée par les Israélites.

Les fouilles sur le site ont mis au jour des preuves claires d’une destruction massive par le feu avec une couche de combustion très épaisse à des températures extrêmement élevées. Cela a amené Kenyon à attribuer l’incendie à une attaque ennemie et non à des incendies qui résulteraient uniquement d’un tremblement de terre.

Bryant Wood :

Elle a affirmé que la ville avait été détruite vers 1550 avant JC par les Egyptiens. En réalité il n’y a absolument aucune preuve que les Égyptiens aient jamais été dans la vallée du Jourdain à cette époque.

Comme Kenyon a daté la destruction de Jéricho 150 ans avant que les Israélites ne soient supposés être là, elle n’a fait aucun lien entre la destruction et le récit biblique. Mais cette date est discutable, nous allons le voir plus bas.

Des jarres remplies de céréales

Bryant Wood :

Dans la ville, une découverte tout à fait unique a été faite, Garstang et Kenyon ont trouvé dans les maisons qu’ils ont excavées, de nombreuses jarres remplies de céréales qui y étaient stockées.

Les jarres de stockage de la ville étaient plutôt pleines. Cela suggère que la récolte n’avait été faite que récemment. Les détails du récit biblique indiquent un événement qui s’est produit au printemps, et dans la vallée du Jourdain, la récolte est recueillie au printemps.

Bryant Wood :

Quand les Israélites ont traversé le Jourdain, la première chose qu’ils ont fait était de célébrer la Pâque, et quand a lieu la Pâque? Au printemps de l’année. Cela correspond au récit biblique parce que le siège n’a duré que sept jours, autrement les gens auraient consommé une grande partie de ce grain si le siège avait traîné pendant des mois. Dans chaque maison qui a été fouillée, ils ont trouvé ces jarres céréales.

Les jarres pleines indiquent également que s’il s’est agit d’un siège, il fut très court, et inhabituel pour une forte ville fortifiée comme Jéricho. De plus ces jarres n’ont pas été pillées comme Dieu l’avait ordonné dans le Livre de Josué (Josué 6 : 17-19). Les armées anciennes avaient pourtant l’habitude de piller les villes avant de les brûler mais l’instruction de l’Éternel était claire et les Israélites s’y sont tenus.

Une section du mur épargnée

Il y a un autre détail qui correspond remarquablement bien à la Bible. Cela a à voir avec la promesse faite à Rahab. Elle vivait en fait dans l’enceinte de la ville et après avoir caché les espions, ils lui ont promis qu’elle et sa famille seraient protégées lorsqu’ils attaqueraient la ville et ils ont tenu leur promesse. Elle avait marqué sa maison avec un cordon écarlate qu’elle avait accroché à la fenêtre.

Mais si sa maison avait été construite dans l’enceinte de la ville, comment aurait-elle pu survivre? Le dossier archéologique que l’archéologue allemand, Ernst Sellin, a publié en 1913 comprend des plans détaillés et des photographies, incluant une partie du site, qui fait écho à l’histoire de Rahab d’une manière inattendue.

Bryant Wood :

Les Allemands ont constaté que dans ce court tronçon, du côté nord de la ville, il y avait des maisons construites sur le rempart, entre le mur inférieur de la ville et le mur supérieur de la ville et certaines de ces maisons étaient construites juste contre le mur inférieur de la ville.

Ils ont constaté que le mur de la ville n’était pas tombé dans cette zone. Cela explique donc comment les espions auraient pu sauver Rahab et sa famille parce que Dieu a fait tomber le mur partout ailleurs, sauf là où se trouvait sa maison, et nous avons des preuves archéologiques à l’appui.

Conclusion sur l’archéologie de Jéricho

Les archéologues ont découvert une ville avec de hauts murs de fortification qui sont tombés, des preuves que la ville a été intentionnellement brûlée après l’effondrement, des jarres de stockage remplis de grains calcinés, des preuves d’un siège rapide au printemps et une section de maisons à l’intérieur du mur qui a été miraculeusement préservée, tout comme dans le récit biblique.

Selon le récit biblique, Josué a lancé une malédiction contre quiconque voulait reconstruire la ville de Jéricho, et l’archéologie montre qu’après la destruction, la ville de Jéricho a été abandonnée pendant des siècles.

Bien sûr, tout cela se produit au mauvais moment selon la plupart des chercheurs. Bryant Wood pense que Kenyon a mal daté la poterie de Jéricho, entraînant une mauvaise date de destruction. Avec Charles Aling, il pense que la conquête a eu lieu en 1400 avant JC, utilisant la chronologie conventionnelle pour l’Egypte et Canaan.

David Rohl et John Bimson ont une idée différente. Ils proposent que Kenyon est arrivée à une mauvaise date de destruction de Jéricho parce que la date assignée à l’âge du bronze moyen est incorrecte et que ces dates pour l’histoire nécessitent un ajustement majeur.

Indépendamment de cela, tous ces érudits conviennent que Jéricho a été détruite d’une manière qui correspond à l’histoire de Josué et des Israélites.

En résumé:

  • Le mur est tombé comme la Bible l’indique, les gravas ont créé une rampe pour que les Israélites puissent monter comme indiqué par le texte
  • Il y a eu un feu comme la Bible l’indique
  • La ville n’a pas été pillée comme la Bible l’indique
  • La maison de Rahab était construite contre le mur et elle a été épargnée comme la Bible l’indique (on trouve ces maisons au nord de la ville).
  • Le siège de la ville a été court comme la Bible l’indique
  • L’attaque a eu lieu au printemps comme la Bible l’indique
  • Les Israélites sont « montés » dans la ville comme la Bible l’indique

Si réellement la ville avait été détruite 150 ans avant l’arrivée des Israélites alors comment l’auteur biblique aurait-il pu décrire avec autant d’exactitude ce qu’il s’est passé à Jéricho surtout s’il avait écrit des siècles après les faits ?

Qu’en est-il réellement de la date de destruction de Jéricho ?

Tout le monde convient que Jéricho a été détruite d’une manière violente et ardente mais tout le monde n’est pas d’accord sur la date à laquelle cela s’est produit.

Les premiers fouilleurs, Sellin et Watzinger, qui ont creusé de 1907 à 1909, ont conclu que Jéricho avait été détruite à l’âge du bronze moyen, au moins 1600 avant JC2

Dans les années 1930, l’archéologue britannique, John Garstang a fouillé un quartier résidentiel de Jéricho et a conclu que la destruction ardente de la ville s’était produite à la fin de l’âge du bronze, ca. 1400 avant JC, la reliant à Josué et aux Israélites3.

De 1952 à 1958, Dame Kathleen Kenyon a fouillé à Jéricho et daté la destruction de la ville IV à la fin de l’âge du bronze moyen, vers 1550 avant JC Jéricho4, signifiant qu’il n’y avait rien à conquérir pour Josué au moment où la Bible décrit la conquête de Canaan.

Plus récemment, l’archéologue Bryant Wood a suggéré que l’analyse de Kenyon de la date de cette destruction est incorrecte, car elle a fondé ses conclusions en grande partie sur l’absence de poterie bichrome chypriote.

Qui a donc raison? Quand Jéricho a-t-elle été détruite? Était-ce vers 1406 av.J.-C., comme le suggère la Bible (basé sur 1 Rois 6: 1, Juges 11: 26-27, Actes 13: 19-20 et le nombre de générations énumérées 1 Chron.6: 33- 38) ou a-t-elle été détruite vers 1550 avant JC.

Pour répondre à cette question, examinons trois des façons dont les érudits ont tenté de dater la couche de destruction à Jéricho.

La datation de la destruction de Jéricho au carbone 14


La datation au carbone 14 mesure la désintégration des isotopes du radiocarbone dans la matière organique. En supposant que le rapport du C-14 dans le passé était le même qu’aujourd’hui, les scientifiques mesurent la proportion de carbone-14 restant dans un échantillon pour déterminer le temps écoulé depuis la mort de la source.

Les résultats sont donnés sur un certain nombre d’années AP (avant le présent), puis convertis en années civiles5. Le carbone-14 est normalement précis à plus ou moins 15 ans, mais plus l’échantillon est ancien, plus il est nécessaire d’étalonner et de corroborer les dates.

En effet, il existe actuellement un débat dans le domaine de l’archéologie concernant la précision de la datation au carbone 14 au Levant6, ainsi que la nécessité de recalibrer la courbe utilisée dans les calculs de radiocarbone7.

Au fil des ans, plusieurs échantillons de charbon de bois et de graines de céréales de la dernière ville cananéenne de Jéricho ont été testés pour les niveaux de C-14. L’équipe de fouilles italo-palestinienne actuelle, dirigée par Lorenzo Nigro, a testé deux échantillons de la destruction finale de la ville en 2000; un échantillon daté de 1347 avant JC (+/- 85 ans) et l’autre daté de 1597 (+/- 91 ans)8.

L’archéologue, le Dr Titus Kennedy, a résumé9:

«La première de ces dates correspond à peu près à la destruction de 1400 avant JC, tandis que l’autre est plus proche de la destruction proposée de 1550 avant JC… ces dates sont si larges qu’elles sont inutiles pour contribuer à résoudre le problème de la date de destruction.

Dans l’ensemble, le C-14 date de la destruction de la ville de l’âge du bronze de Jéricho s’étale entre 1883 avant JC à 1262 avant JC – une plage de plus de 600 ans.

Il faut donc trouver une autre méthode pour déterminer quand Jéricho a été détruite.

Glyphes et inscriptions

Les artefacts avec des glyphes (symboles gravés) et des inscriptions (textes écrits) sont très utiles pour établir la date à laquelle un site a été occupé. Le style de l’objet en question (typologie) et le style d’écriture (épigraphie) sont utilisés par les chercheurs pour déterminer quand l’artefact a été fabriqué. Les inscriptions se trouvent souvent sur des monuments, des tablettes d’argile, des scarabées, etc.

Les scarabées sont des amulettes égyptiennes qui comportent souvent une inscription. Comme ils ont été largement collectés et distribués dans l’antiquité, ils sont fréquemment trouvés dans les fouilles à travers Israël. Parfois, les scarabées incluent le nom d’un pharaon particulier, ce qui les rend utiles dans la datation archéologique.

Lorsque Garstang a fouillé Jéricho dans les années 30, il a découvert plusieurs scarabées égyptiens dans des tombes au nord-ouest de la ville. Les scarabées portaient des inscriptions avec les noms royaux de trois pharaons:

  • Hatchepsout (vers 1503-1483 avant JC)
  • Thoutmosis III (vers 1504-1450 avant JC)
  • Amenhotep III (vers 1386 avant JC-1349 avant JC) 13

Crédit photo, Autorité des antiquités d’Israël, Jérusalem.

L’archéologue John Garstang a découvert plusieurs scarabées et un sceau dans un cimetière près de Jéricho. Sur la photo (de gauche à droite): un scarabée d’Hatshepsout (ch.1503-1483 BC), un scarabée de Thoutmosis III (ch.1504-1450 BC), verso d’un sceau de Thoutmosis III, et scarabée d’Amenhotep III ( vers 1386-1349 avant JC).

Collectivement, ils démontrent que le cimetière de la ville était activement utilisé à l’époque où Kenyon croyait que Jéricho était abandonnée.

Les pharaons comme Thoutmosis III et Amenhotep III étaient populaires et vénérés longtemps après leur mort. Par conséquent, leurs scarabées ont été copiés et collectés pendant de nombreuses années. Hatchepsout, cependant, était méprisée (peut-être à cause de son lien avec Moïse) et son nom a été systématiquement effacé des inscriptions en Égypte dans l’Antiquité. Ses scarabées sont rares car ils n’ont pas été copiés ou conservés comme porte-bonheur. La rareté des scarabées d’Hatchepsout en fait d’excellents indicateurs chronologiques.

En plus de ceux-ci, Kenyon elle-même a découvert un cauri inscrit (coquillage), qui a été daté de 1485 avant JC10.

Pris ensemble, la nature continue des dates de ces scarabées et cauris démontrent que le cimetière à l’extérieur de Jéricho a été activement utilisé jusqu’à la fin du XVe siècle avant JC11.

Cela contredit l’affirmation de Kenyon selon laquelle la ville avait été abandonnée après avoir été soi-disant détruite en 1550 avant JC.

L’excavateur principal actuel, Lorenzo Nigro, tout en épousant la datation de Kenyon, reconnaît que le site était occupé à la fin de l’âge du bronze. Il note:

«Sur le flanc est du tell, Garstang a récupéré une tablette d’argile du bronze final conservant un texte administratif, ce qui suggère que la ville avait encore un rôle politique, un palais, un souverain et même des archives12

Les preuves glyphiques et d’inscription démontrent que l’interprétation de Kenyon selon laquelle Jéricho a été abandonnée au moment de la conquête de Canaan en 1406 avant JC est incorrecte.

La typologie céramique

La typologie de la céramique est la classification de la poterie basée sur ses caractéristiques physiques. Des archéologues, tels que Petrie, Albright et Glueck ont démontré que les différents styles de poterie pouvaient être utilisés pour dater les strates dans lesquelles ils ont été découverts.

Aujourd’hui, la typologie de la céramique est l’un des moyens les plus importants et les plus précis de datation en archéologie13. De nombreuses fouilles se terminent chaque jour par une «lecture de poterie» pour déterminer la date de la poterie en fonction des bords, des poignées, du gravier et des marques des tessons qui ont été découverts.

L’archéologue, le Dr Bryant Wood, un expert en poterie cananéenne, a mené une étude approfondie des rapports de fouilles de Garstang et des divers écrits de Kenyon (elle n’a jamais produit de rapport de fouille sur Jéricho avant sa mort, bien que l’un ait été publié à titre posthume).

Wood découvrit que Kenyon avait fondé sa datation de la destruction de Jéricho uniquement sur l’absence de poterie importée. Au cours de ses fouilles à Jéricho, Kenyon n’a trouvé aucune poterie bichrome (bicolore) importée de Chypre, ce qui est un indicateur majeur de l’occupation du bronze final I. Ainsi, elle a conclu que le site était inoccupé à son époque et avait été détruit 150 ans plus tôt.

De manière difficilement compréhensible, Kenyon semble avoir omis de considérer la poterie découverte par Garstang. Il avait déterré de nombreux exemples d’imitation de poterie «chypriote» bichrome fabriquée localement dans la couche de destruction de la dernière ville cananéenne de Jéricho.

Garstang l’appelait «poterie rouge» et plusieurs des pièces qu’il publia ont des motifs bichromes chypriotes classiques14.

La poterie d’imitation bichrome fabriquée localement est entrée en usage à la fin du bronze IB et n’a plus été fabriquée au bronze final IIA. Comme Garstang et Kenyon ont creusé dans les quartiers les plus pauvres de Jéricho, il n’est pas surprenant que seule de la poterie bichrome fabriquée localement ait été trouvée et que la vraie poterie chypriote bichrome était absente.

La poterie locale que Garstang et Kenyon ont trouvée indique que Jéricho a été détruit vers 1400 avant JC.

Exemples de poteries bichromes fabriquées localement découvertes par l’archéologue John Garstang à Tell es-Sultan (ancienne Jéricho). Crédit photo: Associates for Biblical Research.

Garstang et Kenyon ont mené des fouilles importantes à Jéricho. Tous deux étaient d’excellents archéologues sur le terrain. Garstang a méticuleusement analysé la poterie qu’il a excavée et Kenyon a soigneusement amélioré la méthodologie de fouille en général. Pourtant, les deux ont différé sur leur interprétation des données.

Alors que les données sur le carbone-14 ne sont d’aucune utilité pour déterminer la date de la destruction de Jéricho, la datation des preuves glyphiques / d’inscription et de la typologie de la céramique indiquerait que la date originale de Garstang d’environ 1400 avant JC est la date correcte.

Cela conforte la chronologie biblique de l’armée de Josué détruisant Jéricho dans ce que nous appelons maintenant l’âge du bronze final I.

L’archéologie et la ville d’Hatzor

Mais il y a plus dans la conquête que Jéricho. Les espions avaient rapporté que Canaan était une belle terre, ruisselant de lait et de miel. Mais il était également rempli de grandes villes fortifiées qui avaient des murs atteignant le ciel. Un par un, elles tomberaient aux mains de Josué.

Puis Josué se tourna vers le nord et se dirigea vers la ville de Hatzor, Yabin, roi de Hatzor, rassembla tous les rois de la région contre Israël. Josué captura Hatzor et frappa son roi avec l’épée et il détruisit ensuite Hatzor par le feu.

Les archéologues israéliens de Hatzor ont trouvé une couche de brûlure massive datant du même moment que la destruction de Jéricho. Ils ont également trouvé autre chose.

Le nom ou titre du roi de Hatzor

David Rohl :

Nous avons trouvé des tablettes dans le palais de l’âge du bronze moyen appartenant à un roi appelé Yabin et c’est le nom du roi que Josué a frappé de son épée selon l’histoire biblique.

Il s’agit de la tablette cunéiforme contenant le nom Jabin trouvée dans les restes du palais de l’ancienne Hatzor. Il existe un lien entre l’histoire de la Bible et ces tablettes, un nom identique à celui d’une tablette découverte dans le sol.

Yabin, roi de Hatzor est nommé dans le récit de conquête dans le livre de Josué (Josué 11: 1). Aussi nous lisons «Yabin, roi de Canaan, qui régna à Hazor» près de 150 ans plus tard, au temps des juges (Juges 4: 2).

Cela a amené certains à se demander si les deux récits décrivent le même événement, ou si la Bible se trompe simplement en décrivant un roi vivant depuis si longtemps. L’archéologie a aidé à résoudre ce problème apparent.

Une tablette a été découverte dans les fouilles de Hazor en 1992 adressée à Jabin, le roi de Hazor, qui date des XVIIe-XVIIIe siècles avant JC15. Une autre tablette des Textes Mari (XVIIIe siècle avant JC) avait déjà été découverte nommant «Yabni-Adad »(Jabin-Adad) en tant que roi de Hazor16.

Lorsqu’on ajoute à ces découvertes archéologiques les références bibliques ci-dessus, il devient clair que le nom Jabin a été appliqué aux rois de Hazor sur une période de près de 400 ans. Il est probable que ce soit un titre dynastique et non un prénom; «Yabin, roi de Hazor» serait semblable à «Pharaon, roi d’Égypte» (Exode 6:11).

Yigal Yadin explique:

«Les chercheurs ont suggéré que la forme du nom du roi de Hazor mentionnée dans la Bible – Yabin (Jabin étant la version anglicisée) – est en effet l’abréviation de la formule théophorique complète. Si cela est vrai, alors Yabin a peut-être été un nom dynastique royal des rois de Hazor pendant un certain temps17. »

Les deux couches de destruction d’Hatzor

Crédit photo: Royce Chandler.

La couche de cendres de la destruction ardente d’Hatzor remonte à l’époque de la destruction de la ville par Josué (Josué 11).

La Bible décrit que les Israélites ont conquis et détruit Hatzor à deux reprises: une fois sous Josué pendant la Conquête et une fois sous Barak et Deborah à l’époque des juges:

Josué 11 : 10

A la même époque, sur le chemin du retour, Josué s’empara de Hatsor qui était autrefois la capitale de tous ces royaumes. Il tua son roi par l’épée

Juges 4 : 23-24

C’est ainsi que ce jour-là Dieu humilia Yabîn, le roi cananéen, devant les Israélites. 24 Leur pression contre lui devint de plus en plus forte et ils finirent par l’éliminer.

Ainsi, nous nous attendons à observer des preuves dans les archives archéologiques de destruction au moins deux fois:

  • Une fois au 15ème siècle avant JC (sous Josué)
  • Une deuxième fois au 13ème siècle avant JC (sous Barak et Deborah).
  • C’est précisément ce que les fouilles ont révélé.

Yadin et Ben-Tor ont tous deux découverts des preuves de la destruction de la dernière ville cananéenne par une énorme conflagration au XIIIe siècle av. (Âge du bronze final IIB / III)18.

Cela correspondrait à la destruction de la ville par les Israélites sous Barak et Deborah à l’époque des juges. Fait intéressant, les deux excavateurs ont également trouvé des preuves d’une destruction antérieure de la ville au 15ème siècle avant JC (fin de l’âge du bronze I) qui serait attribuée à Josué.

En fait, il semble que les centres cultuels cananéens aient été spécifiquement ciblés dans cette destruction, ce qui serait conforme aux instructions de Moïse dans Deut. 7: 5.19.

Après avoir analysé les rapports de fouilles de Yadin et de Ben-Tor, l’archéologue Douglas Petrovich résume:

«Compte tenu de la comparaison par Ben-Tor de la destruction ardente de la ville du bronze final I à celle de la ville du bronze final IIB / III, ainsi que de la description par Yadin d’un violent incendie et d’une destruction totale caractérisant le sort de cette dernière, la Hatzor de l’époque de Josué a clairement été détruite par une conflagration massive. La preuve de cette conflagration est visible dans la zone M sur le versant nord du tel, grâce aux fouilles de 2000 et 2001.

Différentes sections de la ligne de combustion et des zones brûlées résiduelles, qui mesurent un demi-mètre à certains endroits, ont été préservées depuis la fin des fouilles dans cette partie de la zone M en 2001.

Cette ligne de brûlure, visible dans toute la zone fouillée, révèle les signes indéniables d’une grande conflagration20.

Les preuves archéologiques de deux couches de destruction correspondent à la description biblique des campagnes de Josué et de Barak / Deborah contre la ville et correspondent à la chronologie biblique du XVe siècle avant JC de la conquête de Canaan.

Les portes de la ville

La porte de la ville de Hatzor date de l’époque du roi Salomon. Photo de Biblewalks.com.

L’une des caractéristiques les plus frappantes de Tel Hatzor aujourd’hui est la porte de la ville à six chambres. Elle date du 10ème siècle avant JC, ce qui a conduit les fouilleurs actuels à conclure qu’elle «peut très probablement être attribué au roi Salomon (1 Rois 9:15)21.» Il semble que pendant le règne de Salomon, seule la partie occidentale du tell supérieur était occupée. Plus tard, sous le règne d’Achab, la ville fut agrandie, avant d’être détruite au 8ème siècle av. par le roi assyrien, Tiglath Pileser III (2 Rois 15:29).

Beaucoup ont noté que la porte de la ville à Hatzor est presque identique aux portes à six chambres à Gezer et Megiddo. Ces portes étaient également initialement datées de l’époque de Salomon, bien que certains aient récemment remis en question cette datation des portes de Megiddo. De nombreux chercheurs ont conclu que la meilleure explication est qu’ils ont tous été construits par le même gouvernement22.

Conclusion sur Hatzor

Les tablettes de Yabin, les deux couches de destruction et la porte de la ville de Hazor sont trois découvertes importantes à Hazor qui confirment des détails bibliques sur la ville.

Conclusion générale

Lorsqu’ils cherchent la conquête dans la période supposée (trop tardive), les archéologues ne trouvent aucune preuve. En fait, beaucoup de ces sites n’ont même pas été occupés pendant toute la fin de l’âge du bronze. Pas de hauts murs, pas de destructions massives, seulement une série de ruines brûlées et vides.

Cela a été un facteur clé dans le scepticisme actuel sur le récit biblique de la conquête. Encore une fois, peut-être se sont-ils égarés en considérant la mauvaise époque. Mais quand on regarde plus tôt dans l’âge du bronze moyen, toutes ces villes étaient occupées, et elles étaient gardées par de hauts murs, et étonnamment, elles ont toutes subi des destructions majeures, dans la même courte période, comme décrit dans la Bible.

John Bimson :

Lorsque vous mettez ces villes côte à côte, le récit biblique et l’archéologie correspondent parfaitement. Je pense que nous avons suffisamment de villes détruites et abandonnées pour dire que cela correspond à la séquence d’événements que la Bible décrit. Il est fort probable que nous observions ici la conquête de Josué.

Si nous mettons de côté un moment le débat sur les dates, nous observons les bons événements dans la bonne séquence, et cela depuis le séjour de Jacob et de Joseph en Egypte jusqu’à l’Exode et la Conquête. Il ne s’agit pas d’une coïncidence.

Références:

  1. Patterns of Evidence : The Exodus ; Biblical sites : Three discoveries at Hazor ; Biblical sites : Three ways to date the destruction at Jericho.
  2. Bryant Wood, “Did the Israelites Conquer Jericho? A New Look at the Archaeological Evidence,” BAR 16:2 (1990): 44-58, 53. Online: https://biblearchaeology.org/research/conquest-of-canaan/2310-did-the-israelites-conquer-jericho-a-new-look-at-the-archaeological-evidence?highlight=WyJjeXByaW90Il0=
  3. John Garstang, “Jericho and the Biblical Story,” in Wonders of the Past, ed. J.A. Hammerton (New York: Wise, 1937), 1222.
  4. Kathleen Kenyon, Digging Up Jericho (London: Ernest Benn, 1957), 262.
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